Par Méric Sauvé Les organisateurs du G7 prévoient une forte résistance de la part des militants et des militantes. En effet, du budget de 604,5 mil- lions $, la majorité, environ 390 millions $ (Bergeron, 2018), seront consacré à la sécurité ! Pour donner un ordre de grandeur, dans le cadre de la campagne « Engagez-vous pour le communautaire », les 4 000 organismes communautaires du Québec réclament 475 millions $ pour régler leur sous-financement pour une année complète. Anxiété pathologique ? Avec un budget de 390 millions en sécurité, on peut s’imaginer que les mesures de sécurité seront massives. Des milliers de policiers, de policières et de militaires sur place, des clôtures de plusieurs kilomètres, des contrôles routiers autour de la ville complète, même les douanes ont un budget accru en sécurité ! Mais de quoi le G7 a-t-il tant besoin de se protéger ? Le G7 a-t-il vraiment quelque chose à craindre ou est-ce que ce budget sert simplement à rassurer nos dirigeantes et dirigeants pris avec des troubles anxieux frôlant la paranoïa ? La réponse sérieuse paraît ridicule en fonction de l’ampleur du budget en sécurité. Ce dont veut se protéger le G7, c’est des militantes et militants, des groupes de revendications et des manifestations citoyennes ! En effet, les groupes citoyens se mobilisent pour s’opposer au G7, pour le dénoncer et le perturber. Mais pourquoi veulent-ils s’y opposer ? Des thèmes intéressants En regardant les thèmes qui seront abordés au G7 et les questions qui y seront discutées, cela semble prometteur. En effet, parmi les thèmes principaux, on retrouve les changements climatiques, les énergies propres, l’égalité entre les sexes, la prépa- ration aux emplois de l’avenir et la croissance économique qui profite à tout le monde. M. Trudeau va même jusqu’à affirmer que le programme du G7 en est un « progressiste ». Wow, les groupes militants devraient jubiler de joie ! Si c’est bon pour tout le monde, pourquoi s’y opposer ? Le G7 règlera les changements climatiques, l’inégalité entre les sexes et la pauvreté : merveilleux ! Le G7 se soucie de la condition des femmes Plus sérieusement, décortiquons le thème « Promouvoir l’égalité des sexes et l’autonomisation des femmes » pour mieux comprendre ce qui va se passer au G7. Pour promouvoir l’éga- lité des sexes, ils devront inviter des femmes militantes, engagées dans ce combat depuis longtemps qui sont les expertes de leur situation et de cet enjeu ! Enfin ! Bien qu’ils ne les financent pas, ils vont au moins les entendre. Mais la réalité est que les groupes de femmes ne sont pas invités à cette discussion. Le G7 est réservé aux dirigeantes et dirigeants, mais surtout aux dirigeants, car moins d’un quart des parlementaires nationaux des pays du G7 sont des femmes (G7, 2018). Ainsi, ce seront des hommes blancs au pouvoir qui détermineront de quelle manière l’égalité des sexes sera atteinte et les mesures qui seront mises en place pour favoriser l’autonomie des femmes. En plus, quand on regarde de plus près le discours présent dans ce thème, on réalise rapidement que l’économie est le réel sujet dont il est question. En effet, on apprend vite que les femmes représentent un potentiel de développement économique se chiffrant à 12 billions de dollars en une seule décennie. On comprend rapidement que l’égalité entre les sexes n’est pas un objectif qui se suffit à lui-même. Il est intéressant principalement parce qu’il signifie un potentiel de développement économique. Dans ces conditions, on pourrait craindre que le G7 vise l'exploitation des femmes plutôt que leur autonomie. Des motivations louches Bien sûr, on peut dire que c’est une crainte infondée, que nos dirigeantes et dirigeants ne sont pas mal intentionnés. D’ailleurs, ils font souvent des consultations et des évènements où ils invitent les groupes citoyens ; ils sont conscientisés. Bien sûr, mais pourquoi ne les invitent-ils pas au G7 également ? Pourquoi ne pas discuter de ces enjeux à l’ONU où toutes les nations sont présentes ? Pourquoi dépenser les deux tiers du budget prévisionnel pour éviter justement d’entendre les groupes citoyens ? Forcément, il doit y avoir quelque chose de différent avec le G7 ! Dans les faits, le G7 est un évènement particulièrement élitiste. Il ne suffit pas de diriger une nation pour y participer, il faut diriger une nation puissante économiquement et qui accepte une certaine idéologie économique. Cette tendance idéologique permet d’expliquer pourquoi la Chine et la Russie sont exclues, bien qu’elles soient des puissances économiques. Ces enjeux d’exclusion sont complexes, mais ils confirment malgré tout que tous ne sont pas les bienvenus à une discussion « qui profite à tout le monde ». Mais quel est l’intérêt d’exclure autant de personnes des discussions ? De quoi discuteront-ils (ou comment en discuteront-ils) pour expliquer qu’il est préférable de limiter la discussion entre dirigeants et dirigeantes des puissances économiques mondiales ? Lorsqu’on se met à se poser ces questions, on commence à saisir ce qu’est vraiment le G7. Une réunion de gens puissants qui discutent du maintien de l’économie dans ses conditions actuelles. Si un élément confronte ou s’oppose à la logique de la croissance économique, il est exclu. Si un pays a une approche différente de l’économique, il est exclu. Les pays participants au G7 sont les pays qui bénéficient de cet ordre économique et donc qui ont intérêt à son maintien. Ainsi, l’objectif des discussions reste toujours sensiblement le même. Comment vont-ils faire pour maintenir leur position dominante dans l’économie ? C’est dans cette logique qu’ils entrevoient l’égalité des sexes, dans une logique de développement économique de 12 billions $. Le maintien du problème En conclusion, le G7 vise à maintenir le système économique qui produit des inégalités. Croire que le G7 apportera des solutions à tous les problèmes discutés revient à croire que davantage de capitalisme et de néolibéralisme est la solution aux enjeux féministes, environnementaux et d’inégalités de richesse. Bref, le G7 est justement l’inverse d’un évènement « qui profite à tout le monde » ! Sources citées : Bergeron, M. (2018). « G7 : toujours pas d’entente de partage des coûts entre Québec et Ottawa », La presse. En ligne : http://www.la-presse.ca/actualites/politique/politique-canadienne/201803... G7 (2018). Promotion de l’égalité des sexes et de l’autonomisation des femmes. En ligne https://g7.gc.ca/wp-content/uploads/2018/04/18-101-Gender_Equality_FR.pdf

Le G7, est-ce vraiment si terrible ?