Le 2 septembre dernier, les employé-e-s de trois hôtels du centre-ville ont fait grève pendant une dizaine d’heures (ici devant le Delta). Une autre journée de grève était prévue la semaine suivante, mais les progrès dans les négociations ont poussé les comités de mobilisation à l’annuler. Des ententes de principe ont été conclues les 8, 11 et 13 septembre. Par Nicolas Lefebvre Legault Les employé-e-s de deux grands hôtels du quartier, le Hilton et le Delta, ont conclu des ententes de principe avec leurs patrons au début septembre. Comme il s’agit d’une négociation coordonnée, les points de la convention sont les mêmes pour les deux hôtels : une augmentation de salaire de 3 % par année, une augmentation de la participation patronale au fonds de retraite et une protection des emplois malgré la mode des rabais basé sur un entretien moins fréquent. Dans le cas du Delta, le gain est particulièrement impressionnant. De leur arrivée à la CSN en 2010 à la fin de cette convention collective, le salaire des employé-e-s aura augmenté de 25 %. On ne parle pourtant pas d’un hôtel nouvellement syndiqué. En effet, le Delta était affilié aux TCA avant et depuis longtemps. Ce n’était pas un syndicat jaune non plus. Au fil des ans, on a pu les voir en grève aussi souvent, sinon plus souvent, que leurs voisin-e-s du Hilton. La différence fondamentale, c’est la stratégie. Les TCA envoient leur monde au combat tout seuls, comme si les hôtels étaient des îles isolées, tandis que la CSN emploie une stratégie industrielle amenant un maximum de gens au front en même temps. Comment ça marche? Premièrement, chaque syndicat est indépendant, avec une assemblée générale souveraine, mais ils sont unis dans une fédération. Avant chaque négociation, il y a un jeu d’aller-retour entre les assemblées générales et la fédération pour élaborer une plateforme de revendications communes et un plan d’action. Pendant la négociation, non seulement les syndicats frappent ensemble, mais, en plus, un travail collectif est fait pour que ce que signe un syndicat soit acceptable pour les autres. L’objectif est de créer un standard pour l’industrie afin que la concurrence entre hôteliers ne se fasse pas sur le dos des employé-e-s. Chaque syndicat est libre d’adhérer ou pas à la négociation coordonnée, les assemblées générales demeurent souveraines. D’année en année, le nombre de syndicats et d’employé-e-s touchés fluctue. Cette année, on parle de 35 syndicats dans la province, regroupant 5 500 employé-e-s. En 25 ans, c’est la première fois que les personnes syndiquées de Québec sont au cœur du mouvement. Avant, il n’y avait pas la masse critique; c’étaient les gens de Montréal qui partaient le bal en été et Québec suivait à l’automne. C’est lors de la dernière négociation que les syndicats de Québec ont manoeuvré pour que les conventions finissent toutes en été, en même temps que celles de Montréal. Personne n’avait envie de revivre l’expérience d’une grève ou d’un lock-out isolé, comme c’est arrivé dans le passé. Le résultat est spectaculaire. À l’origine, les administrations demandaient des concessions de la part des syndicats. Même si seulement cinq syndicats de Québec sont impliqués, on a vu le 21 août une assemblée générale commune de plus de 1 000 personnes pour lancer le mouvement localement. S’il n’y a pas eu autant d’actions qu’à Montréal, on a quand même pu voir une grève coordonnée d’une journée dans trois hôtels du centre-ville, le lendemain du spectacle de Madonna. Cette seule démonstration de force aura été suffisante pour faire plier la partie patronale et obtenir des gains. Comme quoi, même en 2012, la solidarité et la combativité syndicales paient encore. == Extrait du numéro d'automne 2012 du journal l'Infobourg

Hôtellerie : la solidarité paie encore