Des écarts de revenus persistants et des progrès réels, mais minces Par Agathe Légaré NDLR Chaque année, à l’occasion de la Journée internationale des femmes, le Conseil du statut de la femme rassemble et publie des statistiques sur la situation des Québécoises dans un document intitulé Portrait des Québécoises en 8 temps. L’Infobourg vous propose aujourd’hui un aperçu des données colligées en 2011 par la chercheuse Nathalie Roy du Conseil. Les femmes ont beau être davantage scolarisées que les hommes, elles ont des revenus inférieurs à ceux-ci. Ce paradoxe est toujours d’actualité en 2011, selon le Conseil du statut de la femme. Ainsi, quel que soit leur niveau d’études, les femmes touchent, à leur entrée sur le marché du travail, un salaire hebdomadaire brut inférieur à celui des hommes. Explications possibles ? Trop de femmes (32,9 %) tendent à se concentrer dans des professions majoritairement féminines, lesquelles sont moins bien rémunérées (secrétaire, vendeuse, caissière, éducatrice, infirmière, enseignante, etc.) et un fort pourcentage d’entre elles (23,9 %) travaillent à temps partiel. On peut ajouter qu’en 2009, 63,4 % des travailleurs rémunérés au salaire minimum étaient des femmes. Revenu inégal En 2008, les femmes contribuables ont déclaré au fisc des revenus de toutes sources s’élevant en moyenne à 28 908 $, alors que les hommes déclaraient, en moyenne, 43 528 $. Si l’on s’en tient aux revenus d’emploi, ceux des travailleuses à temps plein correspondaient en 2008 à 78,4 % de ceux de leurs homologues masculins. C’est un progrès mince, mais réel par rapport à l’année 1998 où le revenu d’emploi des travailleuses à temps plein équivalait à 73 % de celui des hommes. Le « temps domestique » et le temps d’aider Le Conseil met en lumière d’autres progrès, mais ils sont d’une lenteur embarrassante. Par exemple, en 2005 comme en 1986, les femmes consacraient en moyenne quatre heures par jour aux travaux domestiques. De leur côté, les hommes y participaient davantage en 2005 qu’en 1986 : leur « temps domestique » est passé de 1,8 heure en 1986 à 2,6 heures en 2005. C’est bien, mais c’est peu. Par ailleurs, les femmes constituent la grande majorité des aidantes naturelles, même si les hommes sont plus présents qu’on ne le croit. En 2006, les femmes se chargeaient de 64,6 % des heures de bénévolat auprès des personnes âgées parmi les gens y consacrant plus de cinq heures par semaine. Les femmes et les lieux de pouvoir C’est à la tête des commissions scolaires et au Conseil des ministres du gouvernement Charest qu’on trouve le plus de femmes. Dans les commissions scolaires, 47,8 % des commissaires et 45,1 % des présidents sont des femmes. Le Conseil des ministres est formé de 44,4 % de femmes alors que 29,6 % des députés de l’Assemblée nationale sont des femmes. Dans les agences de la santé et des services sociaux, les conseils d’administration sont formés de femmes à 42 % et les forums de la population sont féminins à 56,8 %. Aux niveaux municipal et régional, il y a 16 % de mairesses et 29,3 % de conseillères. En 2007, les femmes comptent pour 26,5 % des membres des conseils d’administration des Conférences régionales des élus (CRÉ) et pour 28,7 % des membres du conseil exécutif de ces conférences. Il y a donc une certaine présence féminine dans les lieux de pouvoir. Le Conseil ne nous indique pas par contre combien de femmes se portent candidates aux postes électifs (députée, mairesse, conseillère municipale, commissaire d’école, etc). Ces statistiques permettraient de mesurer la timidité ou l’audace électorale des femmes – et les efforts à consentir pour mousser les candidatures féminines. En effet, si les femmes ne se présentent pas aux élections, elles ne peuvent pas être élues… La place des femmes dans les sphères de pouvoir peut donc dépendre à la fois du système ou de la société, à la fois du choix ou de la volonté des femmes à occuper ce type d’emplois. Et Internet ? Il y a d’autres statistiques qu’on aimerait voir ajouter à l’édition 2012 : celles sur l’utilisation d’Internet, telles que révélées par l’enquête annuelle NETendances du Centre francophone d’informatisation des organisations (CEFRIO). Les femmes, pourtant un peu plus scolarisées que les hommes, ont d’abord hésité devant Internet. En l’an 2000, seulement 34 % des femmes naviguaient sur le Net. Certains observateurs ont même parlé de technophobie. Puis, à la suite d’un rattrapage accéléré, 70 % des Québécoises sont devenues internautes en 2009, comparativement à 76 % des Québécois. Quel usage font-elles d’Internet ? Combien d’heures par semaine y consacrent-elles ? Le Conseil pourrait nous éclairer à ce sujet. === Portrait des Québécoises en 8 temps, édition 2001 présente des statistiques sur la démographie, l’éducation, la situation familiale, le travail, le revenu, la santé, les loisirs et l’emploi du temps, ainsi que le pouvoir. La version électronique du document suivie de la liste complète des références est disponible sur le site www.placealegalité.gouv.qc.ca.


Pendant ce temps, en Angleterre… En décembre 2010, les travailleuses britanniques à temps plein touchaient en moyenne 89,8 % du salaire de leurs homologues masculins. Elles avaient progressé par rapport à 1997, où l’écart de salaire entre les sexes était de 17 %. L’Office for National Statistics de la Grande-Bretagne, duquel proviennent ces données, utilise comme mesure du revenu des travailleurs à temps plein le salaire horaire médian (excluant les heures supplémentaires). Le fait que la Grande-Bretagne soit beaucoup plus avancée que le Québec tient en bonne partie au fait qu’elle a adopté sa première loi sur l’équité salariale en 1970. La loi anglaise tire ses origines de la grève des couturières d’une usine Ford, à Dagenham, en 1968. L’histoire mouvementée de cette grève et des négociations syndicales-patronales qui l’ont ponctuée est racontée avec émotion et humour par le réalisateur Nigel Cole dans le film Les Dames de Dagenham (sortie DVD annoncée pour la fin mars 2011). == Extrait du numéro de mars 2011 du journal l'Infobourg.

Portrait des Québécoises en 8 temps, édition 2011