Québec, le 4 octobre 2010 – Dans un document qu’il lance aujourd’hui à Québec sous le titre Femmes, logement et pauvreté : Sortir du privé, un enjeu de société, le Front d’action populaire en réaménagement urbain affirme que les femmes sont doublement touchées par les conséquences de la pénurie de logements locatifs qui affecte la ville de Québec depuis près d’une décennie.

Écoutez la conférence de presse:

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Organisatrice au FRAPRU, Véronique Laflamme explique : « Plus pauvres pour se payer des logements rarissimes, les femmes sont plus nombreuses à consacrer une part exorbitante de leur revenu au logement. C’est le cas de quatre ménages locataires féminins sur dix. Il faut savoir que le revenu médian des femmes locataires à Québec est de 26 524 $ contre 34 019 $ pour les hommes locataires. De plus, les femmes sont plus nombreuses à être locataires ».

La rareté des logements dans la région est par ailleurs propice à la discrimination dont sont notamment victimes les mères de famille, les personnes immigrantes et les personnes à l’aide sociale. À Québec, comme dans toutes les autres villes, des mères de familles affirment vivre une discrimination reliée à la présence d’enfants. Cette donnée difficilement quantifiable inquiète le FRAPRU. La pénurie a aussi des effets particulièrement dramatiques pour les femmes victimes de violence conjugale. Certaines se maintiennent dans des situations de violence faute de pouvoir en sortir. Des femmes hébergées dans des maisons d’hébergement ne peuvent en sortir parce qu’elles ne trouvent pas un logement convenable à un prix qu’elles puissent payer. De plus en plus de femmes vivent l’itinérance.

C’est le cas de Ginette Gratton, une retraitée qui n’a pas de logement depuis 3 mois. Revenue à Québec en 2008 après avoir vécu en Gaspésie, elle a eu de la difficulté à trouver un logement. Après être passée successivement par une maison de chambre, un logement insalubre loué 400 $ dans le sous-sol d’une maison unifamiliale et une résidence pour personnes âgées qui ne correspondait pas à ses besoins, elle s’est retrouvée sans logement en juillet dernier. « Je regarde les journaux et les annonces sur internet, je ne pensais jamais que cette situation allait s’éterniser mais il faudrait que je mette 100 % de mon budget pour être logée comme du monde », témoigne celle qui reçoit des prestations de la Régie des rentes.

À Québec, comme ailleurs, plusieurs femmes locataires peinent à joindre les deux bouts. Plus de 23 105 ménages locataires, soit 39,5 %, dont le principal soutien financier est une femme consacrent plus que la norme de 30 % de leur revenu au loyer. En comparaison, c’est le cas de 14 800 (29,3%) des ménages locataires masculins. 10 435 ménages locataires féminins qui paient plus de 50% de leur revenu risquent de se retrouver dans des situations particulièrement difficiles. «Depuis 2000, le coût des logements a augmenté en flèche, soit de 30,5% à Québec », rappelle Véronique Laflamme.

Contribution du regroupement national pour le droit au logement dans le cadre de la Marche mondiale des femmes de 2010, le document Femmes, logement et pauvreté: Sortir du privé, un enjeu de société fait suite à une vaste tournée d’ateliers tenue à l’hiver 2010, dans les villes du Québec, dont les quartiers Sainte-Foy, Saint-Jean-Baptiste et Saint-Sauveur à Québec, réunissant des femmes locataires de divers horizons. À partir de leurs témoignages, le document fait état des problèmes de logements vécus par les femmes. Il montre aussi comment le logement social peut les aider.

Ce fut les cas pour Louise Bélanger, une locataire du quartier Saint-Sauveur, qui habite dans un HLM depuis 18 ans. Sur le marché privé, son revenu dans le domaine du maintien à domicile au salaire minimum lui permettait difficilement de subvenir aux besoins de ses enfants. L’obtention d’un loyer a prix modique a changé sa vie : « Je ne consacre pas plus de 25% de mon revenu au logement, je peux vivre normalement. En plus, j’ai un milieu de vie agréable et je n’ai pas à me soucier de où je vivrai l’an prochain. Aujourd’hui, je continue à m’impliquer pour que toutes et tous aient accès à un logement social, que ce soit une coopérative, un OSBL d’habitation ou un HLM ».

« Notre constat est que le marché privé ne permet pas de répondre aux besoins et qu’on ne peut compter sur lui pour faire respecter un droit que toute la société s’en engagée à respecter », conclut Véronique Laflamme. Pour répondre aux besoins les plus urgents, le FRAPRU revendique 50 000 nouveaux logements sociaux en cinq ans. Il estime toutefois que, pour lutter efficacement contre la pauvreté, le gouvernement doit aussi assurer à toutes un revenu décent, ce qui implique l’augmentation de l’aide sociale en mettant fin aux catégories entre aptes et inaptes, de même que l’accroissement du salaire minimum. La Marche mondiale des femmes de 2010 a d’ailleurs identifié ces deux revendications comme des mesures urgentes.

Louise Bélanger et Ginette Gratton, comme le FRAPRU et ses groupes membres de Québec, participeront aux actions de la Marche mondiale des femmes de 2010, dont la manifestation organisée le 12 octobre par la Coalition régionale des femmes contre la pauvreté et la violence et le rassemblement national du 17 octobre à Rimouski. Ginette Gratton qui espère bien réveiller quelque politiciens et politiciennes avec son témoignage, affirme : « On ne peut pas tolérer que les droits ne soient pas respectés, il faut que les choses changent ».

Les femmes ont davantage de problèmes de logement que les hommes révèle un document du FRAPRU