Par Gabrielle Verret 

Il y a près de deux ans jour pour jour, j’écrivais un article sur la catastrophe humanitaire se déroulant en Palestine avec la complicité des pays occidentaux, dont le Canada. Face à mon sentiment d’impuissance, j’écris à nouveau aujourd’hui pour dénoncer la complicité de nos gouvernements et mettre en lumière la force collective que nous pouvons exercer sur leurs décisions en matière de politiques internationales. 

Encore une fois, je tiens à préciser que ce court article n’a pas pour objectif de retracer en détail la chronologie des événements ni le cycle de violence qui a mené à l’action du Hamas le 7 octobre dernier. Mon intention est plutôt d’inviter à s’informer davantage sur cette tragédie humanitaire, résultat inévitable de décennies de politiques coloniales mises en place par l’État d’Israël et tolérées, voire appuyées, par plusieurs grandes puissances. Même si je m’efforce de m’en tenir aux faits, il m’est difficile de rester totalement impartiale face à une telle injustice. À mes yeux, un peuple opprimé, vivant dans des conditions inhumaines et sous la menace constante de l’une des armées les plus puissantes du monde, mérite une couverture médiatique plus équitable, une aide humanitaire significative et un véritable soutien international à son droit à l’autodétermination. 

Alors que la famine, causée par le blocus et la destruction des infrastructures menés par Israël, guette les survivant·e·s, près de 63 746 Palestinien·ne·s ont été assassiné·e·s et 161 245 blessé·e·s depuis le 7 octobre 2023, selon le Bureau de la coordination des affaires humanitaires des Nations Unies (BCAH). 

Bien que la violence se soit intensifiée au cours des deux dernières années, tout n’a pas commencé le 7 octobre 2023. Depuis plus de cent ans, le peuple palestinien subit les conséquences violentes du projet colonialiste qui a mené à la création de l’État d’Israël en 1948 sur ses terres : migrations forcées, expulsions massives dès la Nakba de 1948, guerres successives et blocus imposé à Gaza depuis 2007. Ces mesures coloniales et oppressives se traduisent par des déplacements massifs, la destruction des moyens de subsistance et un taux de chômage élevé, considérés comme des violations du droit international. 

Appelons un chat un chat 

Alors que plusieurs médias traditionnels et États peinent à parler de génocide dans la bande de Gaza, tous les indicateurs sont présents et s’accumulent sous nos yeux. Selon la Convention pour la prévention et la répression du crime de génocide (ONU, 1948), un génocide est commis lorsqu’« il existe l’intention de détruire, en tout ou en partie, un groupe national, ethnique, racial ou religieux en commettant un ou plusieurs des actes suivants » : 

  1. Actes pour tuer des membres du groupe :  Plus de 63 000 Palestinien·ne·s tué·e·s (BCAH, sept. 2025), en majorité des civils, dont un très grand nombre d’enfants. 
  2. Atteintes graves à l’intégrité physique et mentale : Plus de 160 000 blessé·e·s, dont des milliers d’amputé·e·s, avec un effondrement du système hospitalier (BCAH, sept. 2025). 
  3. Conditions d’existence entraînant la destruction du groupe : Famine confirmée par la Classification intégrée de la sécurité alimentaire : plus d’un demi-million de personnes en phase 5, soit catastrophique (août 2025). 
  4. Blocus total : pénurie d’eau, de nourriture, de médicaments, de carburant. 
  5. Destruction de 88 % des infrastructures civiles (UNOSAT, juillet 2025). 
  6. Mesures visant les naissances : Attaques répétées contre les hôpitaux, y compris les maternités et unités néonatales (UNICEF, septembre 2025). 
  7. Des dizaines de milliers de femmes privées d’accès aux soins prénataux et obstétricaux. 
  8. Transfert forcé / déplacements massifs : Près de 2 millions de déplacé·e·s internes sur 2,3 millions d’habitant·e·s, souvent expulsé·e·s à plusieurs reprises (BCAH, août 2025). 
  9. Ordres d’évacuation répétés sans zones sûres réelles. 

En septembre 2025, l’Association internationale des chercheurs sur les génocides a adopté une résolution déclarant que les actions d’Israël à Gaza contreviennent à la définition juridique du génocide selon la Convention des Nations Unies de 1948. Puis, finalement, après près de deux ans, le 16 septembre dernier, une commission d’enquête de l’ONU accuse Israël de génocide à Gaza. Après deux ans de massacres… 

Le rôle du Québec et du Canada dans ce génocide 

Selon les dernières données sur les exportations militaires du Canada publiées en 2022, entre 2021 et 2022, plus de 46 millions de dollars canadiens en armes ont été livrés à Israël*. En mars 2024, le gouvernement fédéral a annoncé la suspension de certains envois d’armes, mais cette mesure a été revue à la baisse et ne concerne finalement que les armes dites « létales ». Affaires mondiales Canada précise désormais que cette restriction ne s’applique pas au matériel pouvant être utilisé indirectement à Gaza. 

Du côté du Québec, la Caisse de dépôt et placement du Québec (CDPQ), principal gestionnaire de l’épargne collective des Québécois·e·s, notamment les fonds des régimes de retraite et d’assurance publics et parapublics, a été pointée du doigt par l’Organisation des Nations Unies (ONU) pour ses investissements massifs : 9,6 milliards de dollars injectés, soit dans le matériel militaire, soit dans l’achat d’obligations israéliennes. 

Il est préoccupant que nos gouvernements investissent de telles sommes dans la destruction organisée de la Palestine. 

Urgence de se mobiliser 

À travers le monde, des millions de personnes dénoncent le génocide en cours et exigent un cessez-le-feu immédiat. En Angleterre, les manifestations de solidarité se multiplient malgré une répression accrue : près de 900 personnes ont été arrêtées lors d’une manifestation à Londres**. 

À Québec, plusieurs manifestations et rassemblements ont été organisés par des collectifs comme Palestine Québec. Ces actions visent à maintenir la pression sur les gouvernements canadien et québécois afin qu’ils cessent leur complicité politique, militaire et économique avec Israël. L’une des plus récentes s’est déroulée le 12 septembre dernier, lors du Grand Prix cycliste, pour dénoncer la présence de l’équipe Israël-Premier Tech appartenant à Sylvan Adams, un Israélo-Canadien proche du gouvernement de Nétanyahou. 

Ces mobilisations s’inscrivent dans une force collective internationale qui doit ultimement obliger les gouvernements à arrêter leur complicité, à l’image des grandes campagnes qui ont contribué à faire tomber l’apartheid en Afrique du Sud. Comme le rappelle l’Association québécoise des organismes de coopération internationale (AQOCI), c’est par l’action coordonnée de la société civile, du milieu communautaire, syndical, par le boycott, les pressions politiques et les mobilisations de masse qu’il est possible de faire plier des gouvernements complices et de mettre fin à des systèmes d’oppression. 

Pour conclure, l’Espagne, ayant reconnu l’état de Palestine en mai 2024, a lancé dernièrement une série de mesures contraignantes contre Israël notamment l’inderdiction aux navires et aux avions transportant des armes ou du carburant pour Israël de le faire sur le territoire maritime et aérien espagnol en plus d’imposer un embargo sur les produits « provenant des colonies illégales à Gaza et en Cisjordanie »***. 

La libération du peuple palestinien est un levier pour le droit à l’autodétermination de nombreux autres peuples subissant diverses formes de violences au nom du colonialisme, du capitalisme et d’autres systèmes d’oppression. 

* Radio-Canada, « Ottawa dit envoyer des équipements militaires “ non létaux ” à Israël depuis le 7 octobre », https://ici.radio-canada.ca/nouvelle/2045725/canada-israel-armes-exportations-letales, 31 janvier 2024. 

** La Presse, « Près de 900 arrestations à un rassemblement de soutien à Palestine Action, https://www. lapresse.ca/international/europe/2025-09-07/londres/pres-de-900-arrestations-a-un-rassemblement-de-soutien-a-palestine-action.php, 7 septembre 2025. 

*** Le Monde, « L’Espagne annonce des mesures pour «mettre un terme au génocide à Gaza», provoquant la colère d’Israël, https://www.lemonde.fr/international/article/2025/09/08/l-espagne-annonce-des-mesures-pour-mettre-un-terme-au-genocide-a-gaza-provoquant-la-colere-d-israel_6639995_3210. html, 8 septembre 2025. 

La Palestine vivra, la Palestine vaincra