Par Vincent Baillargeon

R.E.L.A.N.C.E: un mot de sept lettres qui a fait part de plusieurs discussions dans les dernières semaines. Rentrée parlementaire à Québec et à Ottawa, projet de loi 66 (loi concernant l’accélération de certains projets d’infrastructure), le Discours du Trône ont été des occasions pour les groupes de la société civile et les personnes de se prononcer sur la relance économique souhaitée. Malheureusement ou heureusement, le modèle de reprise est loin de faire consensus. L’Infobourg étant là pour vous, on vous propose un tour d’horizon des différentes positions et demandes.

À bas la relance de la CAQ

Dans les dernières semaines, le Regroupement d’éducation populaire en action communautaire des régions de Québec et de Chaudière-Appalaches (RÉPAC 03-12), ses groupes membres ainsi que des groupes alliés ont exprimé leurs craintes d’une relance inspirée du défunt et controversé projet de loi 61 présenté par la CAQ au printemps dernier. Selon leur communiqué de presse produit le 15 septembre dernier, la relance économique proposée par la CAQ était une aberration sur plusieurs plans. Non seulement, elle ouvre la porte à la collusion et à la corruption, mais en plus la relance repose presque uniquement sur la construction d’infrastructures et ce, en contournant des règlementations environnementales afin d’accélérer le processus. Aucun investissement majeur n’ést prévu en santé, en éducation ou dans les services sociaux alors que ceux-ci ont été durement éprouvés suite à la crise et tiennent de peine et de misère après des décennies de compressions et d’austérité.

Malheureusement, le projet de loi 66 (« nouvelle » moutures du projet de loi 61) ne répond pas plus aux craintes des groupes. Chloé Proulx, militante de la Coalition étudiante pour un virage environnemental et social (CEVES) au niveau collégial explique: « Une fois de plus, on est déçus de ce qui est présenté sur les plans environnementaux et sociaux. Le gouvernement nous avait promis un plan ambitieux et à la hauteur et une fois de plus, on y retrouve des demi- mesures, rien qui ne puisse apporter les changements nécessaires pour modifier notre relation aux écosystèmes et miser sur la justice sociale. Pire encore, on soutient des projets destructeurs comme GNL. Une fois de plus, la CAQ sacrifie la vie au nom de projets économiques ».

Crise sanitaire et crise du logement: le logement social doit être une priorité de Québec et d’Ottawa

Le Front d’action populaire en réaménagement urbain (FRAPRU), le Regroupement des maisons pour femmes victimes de violence conjugale, le Collectif pour un Québec sans pauvreté et le Réseau SOLIDA RITÉ itinérance du Québec ont demandé aux gouvernements canadien et québécois de faire du logement social une priorité immédiate. En effet, la pandémie a rendu visibles les conséquences dramatiques du mal-logement, la pénurie de logements s’incruste et une deuxième vague de contaminations de la Covid-19 risque d’aggraver les choses. « Depuis le déclenchement de la crise sanitaire, on a constaté à quel point les liens sont étroits entre la santé et le logement », résume Véronique Laflamme porte-parole du FRAPRU. Or, selon ces regroupements, le marché privé ne peut, ni ne veut répondre aux besoins qui explosent. Au contraire, il les aggrave par ses opérations spéculatives.

Toujours selon les quatre organisations, les solutions sont à portée de main: Québec doit prévoir dans sa mise à jour financière de l’automne des investissements supplémentaires pour financer un grand chantier de 50 000 logements sociaux d’ici 2025 et il doit absolument accélérer la livraison des 13 000 logements déjà prévus, mais pas encore livrés.

Relance économique : pour une relance juste, verte et féministe

Le 25 septembre dernier, le Regroupement des groupes de femmes de la région de la Capitale-Nationale (RGF-CN)

dénonçait le projet de loi 66 et revendiquait une relance économique juste, verte et féministe. Pour le regroupement, la pandémie nous permet d’observer la place des femmes et leurs rôles essentiels au fonctionnement de la société. Le projet de relance économique, basé essentiellement sur les infrastructures, les oublie complètement. La pandémie a révélé les failles du système, qui se base sur le cheap labor des femmes, sur lequel on repose collectivement pour maintenir l’organisation sociale et familiale.

Le Regroupement des groupes de femmes de la région de la Capitale-Nationale a réitéré l’importance de reconnaitre l’apport du travail visible et invisible, salarié et bénévole des femmes, en temps de crise comme en temps normal. « La richesse, c’est l’heure de la distribuer, et pas seulement de la diriger vers des projets d’infrastructures qui profiteront majoritairement aux hommes. Il faut une relance dont personne n’est écartée, surtout pas celles qui ont écopé le plus de la pandémie », s’est indignée Judy Coulombe, du RGF-CN.

Projet de loi 66: une nouvelle mouture qui présente encore l’environnement comme un obstacle à la relance

Des organisations environnementales* se sont avouées déçues par le projet de loi 66 déposé par la ministre responsable de l’Administration gouvernementale. Elles ont déploré qu’on y présente encore le respect des exigences environnementales comme un obstacle à la relance. Les organisations signataires se sont inquiétées du fait que le gouvernement privilégie, avec le projet de loi 66, l’assouplissement des exigences environnementales et de consultation du public afin d’accélérer certains projets d’infrastructures.

*Les organisations signataires sont: Marc-André Viau, directeur des relations gouvernementales, Équiterre; Geneviève Paul, directrice générale, Centre québécois du droit de l’environnement (CQDE); Diego Creimer, co-directeur par intérim, Fondation David Suzuki au Québec; Martin Vaillancourt, directeur général, Regroupement national des conseils régionaux de l’environnement du Québec; Patrick Bonin, responsable de la campagne Climat-Énergie, Greenpeace Canada; Alice-Anne Simard, directrice générale, Nature Québec ; Alain Branchaud, directeur général, SNAP Québec.

Relance: un mot compliqué