Par La rédaction
Photo : Guitté Hartog

Le Regroupement des groupes de femmes de la région de la Capitale-Nationale (Portneuf- Québec-Charlevoix) et le Comité des femmes immigrantes ont convié les femmes à réaliser, le 15 décembre 2019, un flash mob* contre les violences faites aux femmes ici et ailleurs. Cette action a eu lieu deux fois dans la journée, soit à l’Assemblée nationale, puis à place d’Youville. Une centaine de femmes ont répondu à l’appel, malgré le mauvais temps, pour dénoncer vivement les violences machistes perpétrées et tolérées par la police, les systèmes de justice, les gouvernements et la société.

Ce coup d’éclat répondait à une invitation chilienne pour une mobilisation féministe. En effet, le 25 novembre dernier, le collectif chilien Las Tesis a rassemblé des dizaines de femmes dans un puissant flash mob dénonçant les violences faites aux femmes, les agressions sexuelles et l’impunité de ces crimes, notamment en marge des manifestations contre le président Piñera. Les vidéos de leurs performances sont devenues virales. La chanson et la chorégraphie ont été reprises, entre autres, en Allemagne, en France, en Espagne, au Mexique, au Brésil et au Québec. Depuis, le collectif invite les femmes à travers le monde à reprendre la chanson et à l’adapter selon leurs réalités.

« Maintenant, c’est à nous de nous montrer solidaires et dénoncer les violences machistes, avec notre propre couleur! », a affirmé Lorena Suelves Ezquerro, porte-parole pour cette action. Afin de réagir et dénoncer les violences faites aux femmes, des citoyennes de tous âges de la ville de Québec ont dansé et scandé «Le violeur, c’est toi/El violador eres tu/Tshin a ne ka metshe teshikuat auenu», en français, en espagnol, en innu et en langue des signes du Québec. Elles réclamaient des actions immédiates et structurelles afin de contrer et prévenir les violences envers les femmes.

Au Canada, on ne peut plus passer sous silence le cas des femmes autochtones qui subissent la violence systémique, où racisme, colonialisme et sexisme se conjuguent. «Alors qu’elles représentent 4% de la population canadienne, les femmes autochtones sont près de 25% des victimes féminines d’homicides», rappelle Annie-Pierre Bélanger, du Regroupement des groupes de femmes de la région de la Capitale- Nationale, également porte-parole pour cette action. Cette statistique est issue de la récente Enquête nationale sur les femmes et les filles autochtones disparues et assassinées (ENFFADA). « Elles sont plus de 4000 à manquer à l’appel, selon des estimations documentées par les groupes de femmes autochtones », a ajouté Lorena Suelves Ezquerro.

« La situation des femmes immigrantes violentées sans statut ou en attente de statut n’est pas réjouissante, car elles sont en situation d’extrême vulnérabilité », a indiqué madame Suelves Ezquerro. Les organisatrices ont aussi tenu à souligner que la situation des femmes dans l’industrie du sexe n’est pas plus enviable : elles ont un taux de mortalité 40 fois plus élevé que la moyenne nationale et sont surexposées aux violences sexuelles et à la stigmatisation. Cette dernière statistique n’est pas sans rappeler le décès de Marylène Lévesque, assassinée le 22 janvier dernier à Québec.

Au Québec, les femmes peuvent être victimes d’agression à toutes les périodes de leur vie: durant l’enfance et l’adolescence (trois fois et demie plus d’infractions sexuelles enregistrées par la police chez les filles que chez les garçons), en couple (une femme sur sept agressée sexuellement par son conjoint au cours de sa vie), durant la grossesse et la période périnatale, lors de la vieillesse. « Ces violences sexuelles et sexistes sont décuplées en cas de crise politique ou climatique, comme on le constate avec les femmes chiliennes ou avec les migrations des personnes réfugiées », a spécifié madame Bélanger.

Toujours au Québec, les femmes représentent la quasi-totalité des victimes d’homicides, d’enlèvements, d’agressions sexuelles commises par un conjoint ou un ex-conjoint. Le système de justice ne soutient pas les femmes: elles sont seulement 5% à porter plainte et la quasi-totalité des agresseurs demeurent impunis avec une seule condamnation pour 1 000 plaintes. La vague du mouvement #Metoo ou #MoiAussi a démontré l’ampleur du phénomène de la culture du viol. Malgré tout, des mythes tenaces persistent, tant au niveau de l’intervention policière, que du processus judiciaire, qu’au niveau de la société. Ces mythes protègent les agresseurs en plus de blâmer les victimes.

L’événement du 15 décembre dernier se voulait accessible, ouvert et inclusif pour permettre la participation de toutes les femmes, personnes trans, non binaires et queer. La vidéo a été diffusée sur les réseaux sociaux via Youtube et Facebook. Il est possible de la voir en allant visiter le lien suivant : www.youtube.com/watch?v=_94lVboeceo (sous le titre «Un violador en tu camino – Québec»).

* Un flash mob est un rassemblement de plusieurs personnes dans un lieu public afin d’effectuer une action symbolique convenue comme une chorégraphie ou une action théâtrale, par exemple.

Un flash mob contre les violences faites aux femmes ici et ailleurs : « le violeur, c’est toi! »