Par Vincent Baillargeon Photo : Réal Michaud Durant la fin de semaine des 15 et 16 juin, le gouvernement caquiste a eu recours à deux bâillons pour faire adopter le projet de loi 21 sur la laïcité (PL21) et le projet de loi 9 sur la réforme du système d’immigration (PL9). Projet de loi 9 Le PL9 prévoit des changements au processus de sélection des candidats et candidates à l’immigration, processus maintenant orienté sur les compétences professionnelles, pour mieux répondre aux besoins de main-d’œuvre du Québec et non pas sur le principe du premier arrivé premier servi, comme c’était auparavant le cas. Cette loi entraine la destruction d’environ 13 000 dossiers qui étaient en traitement. Cela touche au total environ 50000 personnes. Ces personnes vont devoir déposer une nouvelle demande dans le nouveau système. Projet de loi 21 Avec le PL21, le gouvernement Legault interdit le port de signes religieux aux employés de l’État en posi- tion d’autorité, incluant les enseignants et enseignantes, dans le cadre de leurs fonctions. Des amendements inattendus ont été déposés par le gouvernement lors de la session intensive. Un premier amendement prévoit qu’un ministre peut nommer une personne chargée de vérifier l’application de la loi. Un autre changement permet qu’une personne récalcitrante s’expose, en cas de manquement, à des mesures disciplinaires. Réactions Les oppositions ont été vives, et ce, de toutes parts. Le Parti libéral du Québec et Québec solidaire dé- noncent un grand risque pour la cohésion sociale. La Ligue des droits et libertés (LDL) rappelle que «Pour la première fois dans l’histoire du Québec, un gouvernement a modifié la Charte des droits et libertés sans le consensus des partis représentés à l’Assemblée nationale. Et en utilisant le bâillon, de surcroît! Ce gouvernement plante un gros clou dans le cercueil de l’État de droit québécois et de notre démocratie». En commission parlementaire, la Ligue des droits et libertés demandait au gouvernement de faire marche arrière avec son projet de loi, toxique pour le climat social. « M. Legault et ses ministres font des appels au calme, mais ce sont eux qui ont plongé le Québec dans ce débat. C’est contraire à une société de droits de violer les droits de certaines personnes pour le confort d’une majorité. De telles actions, sur fond de racisme systémique, ne peuvent être tolérées et c’est pour- quoi la LDL demande le retrait de cette loi », affirme Christian Nadeau, président de la LDL. Au moment d’écrire ces lignes, une requête par Ichrak Nourel Hak, une étudiante en sciences de l’éducation, soutenue par le Conseil national des musulmans canadiens (CNMC) et l’Association canadienne des libertés civiles (ACLC), a été déposée en Cour Supérieure au sujet du PL21. Selon la requête, la loi sur la laïcité « viole la liberté de religion et est discriminatoire à l’endroit des minorités religieuses, puisqu’elle demande potentiellement à des milliers de personnes de choisir entre, d’une part, leur foi, leur identité et l’expression de leurs croyances, et, d’autre part, leur droit de participer au travail des institutions publiques provinciales ». En ce qui a trait au PL9, Me Guillaume Cliche-Rivard, président de l’Association québécoise des avocats et avocates en droit de l’immigration, est déterminé à aller devant les tribunaux pour la contester. Comme on peut le voir, si les deux jours de « débat » auront permis une chose, ce n’est clairement pas une discussion sur l’inclusion et le racisme au Québec...

BÂILLONS À L’ORDRE DU JOUR