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Par Vincent Baillargeon Photo: Réal Michaud Dérèglementations climatiques, dégradation des habitats, disparition des espèces, pollution des sources d’eau potable, vagues de chaleur, d’averses et de sécheresses, impacts sur la santé ne sont que quelques exemples de la nouvelle réalité humaine. Le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) affirmait déjà il y a dix ans avec une très grande certitude que, depuis 1750, l’activité humaine a joué un rôle important dans ces changements, en surchargeant l’atmosphère d’une quantité excessive de gaz à effet de serre. Geste individuel : la solution ? Oui, mais non ! Tout cela est du passé, me direz-vous ? Nous, Québécois et Québécoises, n’avons-nous pas décidé que chaque personne ferait sa juste part ? Ne sommes-nous pas des milliers à être engagés dans une transition ? N’avons- nous pas décidé de réduire notre utilisation de l’avion et compenser les émissions des vols que nous effectuons? De choisir un véhicule écoénergétique si je dois absolument posséder un véhicule, de composter, de choisir des aliments biologiques produits localement ? Nous sommes sauvés ! La lutte contre la crise écologique est beaucoup plus large que quelques gestes individuels des plus riches. Comment acheter des voitures électriques à 50 000 $ quand une personne seule sur quatre ne subvient pas à ses besoins de base au Québec? Comment penser à améliorer «la performance écoénergétique» de son logement quand son propriétaire ne retourne pas les appels? Comment désinvestir son épargne quand on n’a pas d’épargne? Comment jurer de consommer autant que possible bio et local quand on n’a que 75$ par semaine pour faire l’épicerie ? François Lambert : à l’aide ! Les coupables Cent entreprises sont responsables de plus de 70% des émissions mondiales de carbone. Oui vous avez bien lu: 100 entreprises sont responsables de plus de 70% des émissions mondiales de gaz à effet de serre. Selon un rapport de l’organisation non gouvernementale (ONG) internationale Carbon Disclosure Project, il s’agit principalement d’industries pétrolières, gazières et au charbon. Le rapport s’appuie sur des données publiques s’étendant de 1988 à 2015. Pour l’ONG, l’enjeu est désormais d’appeler les investisseurs, privés ou publics, à davantage de conscience environnementale en ne finançant pas les entreprises qui misent encore sur les énergies fossiles. Cependant, alors qu’il y a urgence, les différents gouvernements du monde subventionnent encore pour près de 500 milliards de dollars américains par année les producteurs de charbon, de pétrole et gaz naturel dans le monde, peut-on lire dans le rapport Financing Climate Futures : Rethinking Infrastructure. Qu’en est-il au Canada et au Québec? En 2014, selon les données du ministère de l’Environnement, sur les 40 sites industriels qui polluent le plus au Canada, un seul est au Québec, alors que 20 se trouvent en Alberta. La raffinerie Jean-Gaulin (raffinerie Valero) de Lévis émet 1275000tonnes de CO2 par année. En comparaison, c’est autant que toutes les émissions de la Guinée. Malgré les promesses et les beaux discours des gouvernements fédéral et provincial, l’agence officielle de crédit à l’exportation du Canada (Exportation et développement Canada), organisme relié au gouvernement, verse 10 milliards $ canadiens par année. Ces subventions vont à de nombreuses entreprises de combustibles fossiles et pour de vastes projets pétroliers et gaziers, selon l’organisme Oil Change International. Le gouvernement du Québec n’est pas meilleur élève. Il offre plus de 300 millions$ par année en soutien financier pour la consommation et le développement des énergies fossiles, révèle la première évaluation sur cet enjeu de finances publiques et d’environnement réalisée par Équiterre et l’Institut international du développement durable (IIDD). Les premières victimes Ces compagnies ultra financées et les gouvernements collaborateurs, en plus de créer des dommages définitifs sur la planète, favorisent les inégalités entre les personnes. Parce que non, nous ne sommes pas égaux face à la crise climatique. Autant sur les responsabilités de celle-ci que pour en subir les effets. Les différents droits et discriminations sont interreliés. Les conséquences de la crise écologique accentuent les inégalités, ce qui a pour effet d’écarter les personnes déjà marginalisées. Nous le vivons déjà au quotidien. Durant la canicule de l’été 2018, 90 personnes ont perdu la vie au Québec. De ce nombre, une grande majorité était des personnes marginalisées, âgées, en situation d’itinérance, locataires ou ayant un problème de santé. Les quartiers centraux de la ville de Québec sont les plus touchés par la crise climatique. Ces quartiers subissent les îlots de chaleur, une densité de population très élevée, un indice de défavorisation élevé et un manque flagrant d’espaces verts. La population résidant dans ces quartiers centraux doit aussi vivre avec diverses formes de pollution atmosphérique. L’air que les citoyens et citoyennes respirent chaque jour est plus pollué que la moyenne québécoise, notamment à cause des installations portuaires et de l’incinérateur. Des projets comme l’agrandissement du port de Québec et le 3e lien ne feront qu’accentuer cette pollution. De plus, d’ici 30 ans, une bonne partie de la Basse-Ville de Québec et de Limoilou sera inondée par la montée des eaux si les émissions mondiales de gaz à effet de serre ne diminuent pas. Le printemps sera chaud ! L’énergie bouillonnante des groupes et des personnes mobilisés réchauffera, ou plutôt refroidira, les ardeurs des gouvernements et entreprises qui détruisent notre planète et nos vies. Finies les subventions aux destructeurs ; finis les projets dévastateurs ; finis les propriétaires qui laissent les locataires en danger ; finies les coupures dans les programmes sociaux et services publics ; finie la pollution de nos lacs et rivières! À nous d’y mettre fin ! À nous la rue! À nous la Terre