Par Jonathan Carmichael, militant salarié à l’Association pour la défense des droist sociaux Québec-métro (ADDS-QM)

Dans la mise à jour économique du gouvernement caquiste déposée en novembre dernier, le ministre des Finances Éric Girard annonçait une indexation de 5,08 % des prestations d’aide sociale à compter du 1er janvier 2024. Pourtant, quand on regarde le montant reçu sur les chèques des prestataires des programmes d’aide sociale*, d’objectif emploi** et de la solidarité sociale***, l’augmentation est moindre (elle est de 4,81 % pour une personne sans contraintes à l’emploi et de 4,65 % pour une personne étant en contraintes sévères depuis moins de 66 mois). Pourquoi ?

Une prestation de base et un ajustement

Pour la plupart des personnes assistées sociales, le montant mensuel reçu est composé d’une prestation de base et d’un ajustement. Cet ajustement provient du Plan d’action gouvernemental pour l’inclusion économique et la participation sociale, présenté en 2017 par le gouvernement qui était alors formé par le Parti libéral du Québec.

Dans ce plan de lutte à la pauvreté, le gouvernement libéral, dans un rare moment de clairvoyance, arrivait à un constat évident pour toutes les personnes assistées sociales : « [les prestations d’aide financière de dernier recours] n’ont pas progressé au même rythme que le coût de la vie, entraînant un manque à gagner ». Le gouvernement annonçait alors une augmentation des prestations d’aide financière de dernier recours de 45 $ par mois pour les personnes des programmes d’aide sociale et d’objectif emploi, et une augmentation de 103 $ par mois pour les personnes du programme de solidarité sociale.

Toutefois, ces montants n’ont pas été simplement ajoutés à la prestation de base. François Blais, le ministre de l’Emploi et de la Solidarité sociale à l’époque, a plutôt choisi d’ajouter de nouveaux articles au Règlement sur l’aide aux personnes et aux familles, qui ont fait en sorte que les montants annoncés dans le plan de lutte à la pauvreté sont devenus des ajustements. Un détail ? Pas tant.

Un ajustement pas indexé

Depuis le 1er avril 2011, il y a un article dans le Règlement qui prévoit l’indexation automatique de certains montants, chaque année le 1er janvier. C’est le cas des montants des prestations de base. Ce n’est toutefois pas le cas des ajustements mensuels de 45 $ ou de 103 %, issus du plan de lutte à la pauvreté. Ainsi, ces ajustements sont figés au même montant depuis 2018.

Autrement dit, l’augmentation annoncée en 2017 parce que les prestations n’avaient pas progressé au même rythme que le coût de la vie n’a pas suivi, ironiquement, la hausse du coût de la vie! Si, depuis 2018, les ajustements avaient été indexés au même taux que celui prévu au Règlement, les personnes aux programmes d’aide sociale et d’objectif emploi recevraient 10 $ de plus par mois, alors que celles au programme de solidarité sociale auraient 23 $ de plus par mois sur leur chèque.

Le fait de ne pas avoir inclus à même les prestations de base les augmentations annoncées dans le plan de lutte à la pauvreté de 2017 prive aujourd’hui les personnes assistées sociales d’un montant annuel de 120 $ ou de 276 $. Quelle crosse scandaleuse, une fois de plus, de la part de nos gouvernements envers les personnes les plus pauvres de notre société!

*Le programme d’aide sociale est composé des personnes sans contraintes ou avec des contraintes temporaires à l’emploi

**Le programme objectif emploi est composé des personnes qui font une première demande d’aide financière et qui sont sans contraintes à l’emploi.

***Le programme de solidarité sociale est composé des personnes présentant des contraintes sévères depuis moins de 66 mois.

 

Une indexation partielle des chèques d'aide sociale