Par Jonathan Carmichael, Bureau d’animation et information logement (BAIL)

Après l’avoir fermement nié depuis le début de son mandat comme ministre de l’Habitation, madame Andrée Laforest a reconnu, enfin, en avril dernier, l’existence d’une crise du logement au Québec. Cette reconnaissance du problème s’est toutefois faite du bout des lèvres, la ministre indiquant que la crise n’existe que dans les villes où les taux d’inoccupation sont en bas de 1 %.

Qu’en est-il à Québec ? Malgré les prétentions de la ministre caquiste, plusieurs indices démontrent que la crise du logement frappe de plein fouet la région. Les logements sont rares et inabordables, les stratagèmes utilisés par les propriétaires immobiliers pour augmenter abusivement les loyers sont en forte augmentation et un nombre croissant de locataires peinent à se trouver un logement.

Des logements plus rares

Selon les plus récentes données publiées par la SCHL, le taux d’inoccupation de l’ensemble des logements était de 2,5 % à l’automne 2021 dans la région métropolitaine de recensement (RMR) de Québec. Bien que relativement stable, il s’agit quand même de la troisième année consécutive où le taux d’inoccupation est sous le seuil où le marché est dit équilibré (3 %).

Le marché de l’habitation est particulièrement serré pour les familles et les ménages composés de plusieurs personnes. Le taux d’inoccupation est de 2 % dans les logements de deux chambres à coucher et d’à peine 1,4 % dans les grands logements de trois chambres et plus.

La pénurie de logements affecte davantage certains secteurs. À Lévis, le taux d’inoccupation de tous les logements est de 1,1 %. À Québec, il est tout particulièrement bas dans la Basse-Ville (1,5 %), à Beauport (1,2 %), à Charlesbourg (1,3 %) et dans la Haute-Saint-Charles (1,1 %).

De plus, sans surprise, la rareté est plus aiguë dans les logements où les loyers sont moins élevés. Ainsi, elle touche davantage les ménages les moins nantis. Selon la SCHL, un ménage dont le revenu est inférieur à 25 000 $ par année devrait payer en bas de 625 $ par mois pour que son loyer soit considéré comme étant « abordable ». À l’automne 2021, il n’y avait que 241 logements inoccupés à ce prix-là dans l’ensemble de la RMR de Québec, ce qui place le taux d’inoccupation des logements « abordables » pour les locataires pauvres à 0,2 %.

Au contraire, la pénurie de logements n’existe pas dans les immeubles de luxe. Le taux d’inoccupation des logements dont le loyer se situe entre 1 250 $ et 1 499 $ par mois est de 4,8 % et de 7,1 % dans les logements de 1 500 $ et plus.

Des loyers plus chers

À l’automne 2021, le loyer moyen mensuel dans la RMR de Québec est de 916 $. Parmi les régions métropolitaines de recensement de la province, Québec arrive en deuxième place pour la cherté des loyers, derrière Gatineau, mais tout juste devant Montréal.

Le resserrement du marché privé locatif a eu des effets à la hausse sur le prix des loyers. Depuis la chute à Québec des taux d’inoccupation sous le seuil d’équilibre, en 2019, la hausse annuelle du loyer moyen est de 4,2 %. À titre comparatif, entre 2015 et 2018, alors que les taux d’inoccupation étaient au-dessus du seuil d’équilibre, le loyer moyen augmentait de 2,3 % par année.

Hausse des problèmes pour les locataires

La rareté des logements et la cherté des loyers ont eu des conséquences désastreuses pour les locataires. Depuis deux ans, on constate une hausse marquée des tentatives de rénovictions dans la région. En comparaison avec la situation qui prévalait il y a cinq ans, le nombre d’appels de locataires à ce sujet a presque quintuplé.

De plus, une hausse majeure de locataires utilise les services mis en place à Québec par l’OMHQ pour aider les locataires qui ont des difficultés à se trouver un logement. En 2020, tout comme en 2019, près de 300 locataires ont utilisé le service. Les cinq années précédentes, la moyenne tournait autour d’une cinquantaine de demandes par an.

L’inaction de la CAQ

La crise du logement actuelle est historique. Elle touche à la fois les grands centres comme Montréal et Québec, maiselle s’étend aussi à l’ensemble des régions de la province. Devant un tel contexte, on serait en droit de s’attendre à une réponse politique pour aider les locataires. Pourtant non. La ministre Laforest et le gouvernement caquiste font preuve d’une totale inaction.

Les temps sont durs pour les locataires de Québec