Par Fabien Abitbol

Au quatrième hiver de sa mise en place, il faut se rendre à l’évidence : la politique de « viabilité hivernale » n’est pas viable. Du moins pas en l’état.

Du 23 décembre 2022 au 17 février 2023, le maire Marchand et l’élu responsable du déneigement Pierre-Luc Lachance n’ont pas eu que des mots doux sur les réseaux sociaux. Ils ne sont pourtant pas directement responsables de la situation chaotique du déneigement.

La politique dite de « viabilité hivernale » a remplacé la politique de déneigement (un peu dépassée et souvent malmenée) en novembre 2019 après un an et demi de consultations. C’était donc sous l’administration Labeaume.

Premier couac dès novembre 2019 : un verglas s’est déposé sur les trottoirs déjà mal en point des quartiers centraux avant que les cols bleus ne procèdent à un épandage. Résultat des courses : après chaque déneigement on retrouvait le verglas accroché tel une moule sur son rocher. Mais ce n’est pas tout : le verglas, toujours aussi fourbe, est revenu en novembre 2020 avant l’épandage. Ce qui en 2019 pouvait éventuellement être mis sur le dos d’une adoption politique tardive de cette politique de « viabilité hivernale » n’était plus excusable un an plus tard. Fin 2021, après les élections, un autre maire tenait la barre du navire. Mais cette fois c’est la neige qui est tombée en premier.

Quelques surprises en centre-ville

Évidemment c’était la faute du nouveau maire, par simple manque de communication. Pire encore fin 2022, au point que la machinerie s’est mise en branle le 23 décembre afin que les résident·e·s puissent recevoir la famille, pour le premier noël à peu près normal depuis la pandémie. Petit détail : le 23 décembre 2022 était un vendredi. Or cette politique de « viabilité hivernale » prévoit que l’enlèvement de la neige se fait du dimanche au jeudi. Donc déclencher l’artillerie lourde un vendredi n’est pas prévu.

Que s’est-il passé en février 2023? Par deux fois en huit jours, il y avait des monceaux de neige à dégager un vendredi. Le premier vendredi concerné était la fin du carnaval et le début du tournoi pee-wee : deux événements qui tombent en hiver et qui, les années précédentes, avaient été ternis par la Covid. Cette année par surcroît, l’hôtellerie a été plus sollicitée qu’en 2019 avant la pandémie. Par ailleurs, au tournoi pee-wee il y avait une équipe « ukrainienne » composée de joueurs qui venaient de plusieurs pays pour l’occasion.

La fin de semaine de fin du carnaval, il n’était pas aisé de marcher dans les rues. Seuls les abords du palais de Bonhomme avaient été nettoyés. Ce qui déjà est une dérogation à la politique de « viabilité hivernale ». Dans ce cas, on peut se demander pourquoi n’avoir pas nettoyé tout l’arrondissement afin de satisfaire les résident·e·s, les touristes, les carnavaleux et les amateurs de hockey.  220 000 spectateur·rice·s d’un tournoi en dix jours, ça prend des rues bien entretenues.

La Ville a invoqué des problèmes techniques mais les cols bleus ont démenti quelques jours plus tard.

La semaine suivante une très grande quantité de neige s’est abattue le vendredi, à partir de 2h du matin et toute la journée. Ce n’est pas rare en février. D’ailleurs à même date en 2022 on pouvait passer en ski devant l’église Saint- Jean-Baptiste. Et ce vendredi 17 février, la Ville a procédé à une triple dérogation à cette politique de « viabilité hivernale » :

  • nous étions un vendredi ;
  • seuls les arrondissements de La Cité Limoilou et Sainte-Foy Sillery Cap-Rouge étaient concernés ;
  • le but n’était pas de tout enlever mais de faire au mieux, sachant qu’il faudrait aussi travailler le dimanche soir.

« Mon pays, ce n'est pas un pays, c'est l'hiver », nous a chanté Gilles Vigneault.

Il serait temps de réaliser que priver les résident·e·s, les commerçant·e·s et les touristes de déneigement 28% du temps, c’est peut-être beaucoup. Il serait temps (si pour des raisons de personnel ou de sous-traitants) de ne plus chercher à déneiger toute la ville la même nuit, puisqu’il y aura toujours des mécontent·e·s. Il serait temps peut-être aussi de ne pas se contenter de mentionner à la fin des communiqués de déneigement que les résident·e·s sont invité·e·s à ne pas mettre les ordures sur les trottoirs : cette partie du communiqué n’est jamais diffusée à la radio et de nombreux·se·s résident·e·s ne réalisent pas qu’ils se pénalisent et pénalisent leurs voisin·e·s. N’y aurait-il pas une possibilité au moins dans les secteurs denses de faire une vérification et un ramassage entre 21h et 23h pour les ordures comme pour les voitures? Et mettre un avertissement sur les portes correspondant aux emplacements des sacs ou des bacs?

Pour que cette politique de « viabilité hivernale » soit elle-même viable, il est temps de corriger le tir. Pierre-Luc Lachance a annoncé qu’il serait à l’écoute de la population. On ne peut qu’espérer qu’il le soit vraiment.

Les hauts et les bas du déneigement