Par Alexandra Henriques

Le racisme, quoi dire encore quand on a déjà tout dit? Mais personne n’écoute. Alors on recommence. Tout d’abord, il n’y a pas de races. Tous les humains appartiennent à une seule espèce, c’est de la biologie de base. Les différences de peau sont aussi superficielles que la couleur des yeux ou des cheveux.

Pourtant, depuis des centaines d’années, le racisme –une distinction, exclusion, restriction, ou préférence fondée sur la race, la couleur, l’héritage, ou l’origine ethnique– est une plaie ouverte sur les sociétés. Le racisme a énormément facilité l’impérialisme et le colonialisme à partir du 15e siècle. Ou est-ce que c’est l’impérialisme et le colonialisme qui ont engendré le racisme? Il ne faut jamais sous-estimer la puissance du gain et du pouvoir.

On trouve beaucoup de racisme chez les bénéficiaires des processus de colonisation, que ce soit sur leurs propres terres, ou sur les terres qu’on a colonisées et qu’on occupe encore, comme l’a noté la cinéaste maori Merata Mita et sa caméra témoin des luttes antiracisme en Nouvelle-Zélande. Il n’a pas suffi de voler les ressources, de voler les autochtones, de voler les terres, on va créer des barrières à leur intégration chez nous en éducation, en emploi –le racisme systémique. Un participant à l’indignation étudiante face au racisme à l’université Sir George Williams à Montréal, en 1968, dit que les suppositions de l’esclavage sont devenues institutionnalisées, en tant qu’être humain on est si dévalorisé qu’on n’a pas l’opportunité de les corriger (Voir Ninth Floor de Mina Shum).

Il suffit de comparer Incident à Restigouche (Alanis Obom- sawin) avec Bastion Point (Merata Mita). Il suffit de comparer la situation des peuples autochtones du Groenland au Québec à l’Australie. Où seraient cette soi-disant « civilisation », et les élites de la classe dirigeante blanche de l’Europe et des Amériques sans les gains de la colonisation, la main d’œuvre gratuite de l’esclavage, et cet immobilier qu’on vend avec bénéfice?

Au Canada, depuis toujours les Autochtones et les Noir·e·s sont les deux groupes avec le revenu le plus bas dans tout le pays – 28 % de moins à présent. La population est complice de tout ceci parce qu’on est encore bénéficiaires de la colonisation. Apparement, ça prend trop d’effort de tout débrouiller, tout comprendre, et de faire un effort de séparer sa vie au moins un peu des gains de la souffrance d’autrui. Tout le Canada est encore, comme on dit en anglais, living off the avails of colonisation, et pas le moins les entreprises minières, pétrolières, et forestières. Mais si ces peuples sont à dédaigner, pourquoi la ruée vers l’art africain et autochtone, jusqu’à ce que les musées refusent encore souvent de retourner les articles volés?

Il devrait juste suffire de lire la loi sur les Indiens de 1876 pour nous réveiller. À commencer par le mot « indien »! C’est incroyable de lire que c’est un peuple étranger qui
a le pouvoir de dire qui est « indien » et qui ne l’est pas, qui a le pouvoir de dire au, XXIe siècle, que si une femme autochtone épouse un homme qui n’est pas autochtone, elle n’a plus de droits autochtones ! Elle est où, votre indignation?

L’échafaudage du racisme