Par Vincent Baillargeon
Photo: source : Assemblée nationale
 

Éric Girard, ministre des Finances du Québec, présentait le 25 mars dernier le troisième budget de son gouvernement. C’est certes dans un contexte bien particulier que nous avons entendu le ministre, tel un robot bien préparé, nous présenter les orientations financières de la prochaine année. Aucune surprise par contre: des miettes pour les personnes en situations de précarité, en même temps que des nuages très sombres à l’horizon.

Les seules mesures du budget qui auraient pu renforcer le filet social sont nettement insuffisantes ou bien totalement absentes:

  • Un méprisant 500 nouvelles unités de logements sociaux programmées de 2021 à 2027. En comparaison, la Ville de Québec, à elle seule, demandait 500 unités par année, et ce, pour les cinq prochaines années.

  • Un maigre 10,6 millions $ sont alloués à la rénovation des HLM pour tout le Québec. Rappelons que la Ville de Montréal, à elle seule, a besoin de 80 millions de dollars supplémentaires annuellement pour éviter de devoir barricader d’autres immeubles.

  • Une aide ponctuelle et non récurrente de 41,8 millions $ pour certaines initiatives des groupes d’action communautaire autonome. Le Réseau québécois de l’action communautaire autonome estime actuellement les besoins à 460 millions $.

  • 18,5 millions $ destinés à la bonification des prestations spéciales liées à la santé pour les personnes assistées sociales sur une période de cinq ans. Malheureusement pour les personnes à l’aide sociale, il s’agit seulement d’un rattrapage pour cause de non-indexation sur de nombreuses années.

  • 22 millions $ sur cinq ans pour le réseau des maisons qui accueillent des femmes victimes de violence à la recherche d’un hébergement temporaire. Encore une fois, ce montant est insuffisant. Ce réseau demandait 70 millions $ pour ouvrir davantage de maisons et ainsi mieux répondre à la demande.

Le gouvernement a reporté l’objectif du déficit zéro en 2027-2028. L’idée de le repousser n’est pas une erreur. Dans un contexte de troisième vague de COVID-19, certains des investissements prévus sont plus que nécessaires, notamment les montants annoncés en éducation et en santé. Le gouvernement aurait dû annoncer des sommes suffisantes pour l’ensemble des services publics et des programmes sociaux.

Cependant, plusieurs autres mesures et annonces nous amènent à prévoir le pire pour l’avenir. Des investissements tels que 50 millions $ pour la construction de chemins «multiusages» en forêt publique ou encore 30millions $ sur deux ans pour développer l’extension du réseau de distribution de gaz fossile, incluant le gaz liquéfié, confirment que le « Plan vert» de la CAQ n’est que de la poudre aux yeux. De plus, les «mesures d’optimisation » annoncées par le gouvernement ne vont clairement pas dans une perspective de renforcement du filet social. Pensons simplement à l’annonce de couper 5000 postes dans les ministères et organismes, ou encore la réduction du financement de 3 millions $ du Secrétariat à la condition féminine.

Malgré tout, on doit avouer que les ministres caquistes sont rusé·e·s. En effet, ils et elles reportent toutes les décisions difficiles après 2022, c’est-à-dire après les élections. Les débats de fond sur la façon d’atteindre l’équilibre budgétaire, le type de relance économique souhaitée ou les mesures permettant de s’assurer d’un filet social efficace sont donc reportés. La CAQ aime mieux nier certains débats importants et cherche avant tout sa réélection.

 

Budget provincial 2021-2022: des nuages habilement sombres