Par Nicolas Lefebvre Legault La ministre Christine St-Pierre profite d’une consultation sur l’avenir de l’information au Québec pour remettre en question le soutien aux médias communautaires. Le monde des médias est en plein bouleversement. Concentration de la presse, baisse des revenus publicitaires, fragmentation des auditoires, conflits de travail, concurrence d’Internet : la liste des problèmes nuisant aux médias est longue. C’est pourquoi Christine St-Pierre, la ministre québécoise de la Culture, des Communications et de la Condition féminine, a commandé un rapport, en 2009, sur l’avenir de l’information. Le rapport Payette, rendu public en janvier 2011, propose notamment la création d’un titre de journaliste professionnel, une orientation reprise par le Ministère dans un document de consultation intitulé Pour une information au service de l’intérêt public. De ça, on en a parlé beaucoup dans les médias. Ce dont on parle un peu moins, par contre, c’est du fait que la ministre en profite pour remettre en question le soutien financier de l’État québécois aux médias communautaires. Les orientations du Ministère en matière d’information portent sur quatre points. Il est notamment proposé de créer un statut de journaliste professionnel, de consolider le rôle de tribunal d’honneur du Conseil de presse du Québec, de créer une plateforme d’information régionale et interrégionale (sur le site Internet de Télé-Québec) et, finalement, « d’actualiser le soutien de l’État aux médias communautaires ». En soi, le document de consultation n’est pas très alarmant en ce qui concerne le rôle des médias communautaire. On y parle de leur origine, ainsi que du programme d’aide gouvernemental. Là où le bât blesse, c’est dans les questions de consultation. Entre autres questions troublantes : « La problématique de l’accès aux médias est-elle toujours d’actualité avec l’arrivée des nouveaux médias? » Le Ministère demande même carrément : « Le soutien de l’État est-il toujours pertinent? » Voilà qui a de quoi donner des sueurs froides aux gestionnaires de médias communautaires. Soyons brutalement francs : À Québec, le soutien de l’État aux médias communautaires ne permet pas d‘atteindre tous les objectifs officiels du programme. Pour l’accès de la population aux médias et le développement local, ça va. Par contre, et c’est peut-être différent en région, les sous de l’État ne permettent pas réellement ici « d’améliorer l’offre d’information locale et régionale ». Si, en plus, on définit l’information d’intérêt public comme « l’information généraliste basée sur des enquêtes et des reportages approfondis », alors là on rate la coche la plupart du temps, dans la plupart des médias communautaires. Est-ce la faute aux médias communautaires? Non. Dans les faits, le soutien de l’État couvre à peine les frais de production matérielle desdits médias. Il n’y a tout simplement pas assez d’argent pour produire de l’information et engager des journalistes (même chichement payés). Il était peut-être possible d’espérer, dans le passé, que les médias communautaires génèrent des revenus publicitaires suffisants pour se développer, mais il est de plus en plus clair que cela relève de l’utopie, au moins dans les milieux urbains. Pourtant,même à Québec, un marché d’information relativement privilégié, nous avons désespérément besoin de maintenir une diversité de voix médiatiques. Il y a tant de dossiers négligés par les Gesca, Radio-Canada, Transcontinental et Quebecor de ce monde (sans parler de la radio-poubelle). Ici aussi nous aurions besoin « d’améliorer l’offre d’information locale et régionale » et d’obtenir un soutien accru pour permettre la production d’une « information généraliste basée sur des enquêtes et des reportages approfondis ». Mais pour ça, il faudrait non seulement actualiser le soutien de l’État aux médias communautaires, mais le bonifier radicalement afin de permettre à chaque média d’embaucher au moins un journaliste à temps plein. Qui sait, à la gang, ces journalistes communautaires arriveraient peut-être à créer une vraie salle de rédaction. L’Infobourg ne reçoit pas de subventions à titre de média communautaire et n’est donc pas directement touché par la consultation. Dans la région de Québec, le journal Droit de parole et les stations de radio CKIA et CKRL font partie des médias communautaires soutenus par le ministère de la Culture, des Communications et de la Condition féminine. Il y aura une séance de consultation publique à Québec le vendredi 21 octobre. Pour plus d’informations : http://mcccf.gouv.qc.ca/index.php?id=3277. == Extrait du numéro d'automne 2011 du journal l'Infobourg.

Nos médias communautaires sont-ils menacés?